Le ministère de la femme

Elle est d’autant plus importante quand on considère le besoin urgent de voir tous les dons que Dieu a faits aux membres de son Église qu’il appelle à se manifester. Mais cette question a dépassé les murs de l’Église. Les penseurs séculiers attaquent volontiers l’Église en l’accusant d’être contre les femmes et donc de ne pas vivre avec son temps.

Les Assemblées de Dieu des États-Unis et bien d’autres dénominations nées des Réveils de la Pentecôte ont ouvert la porte au ministère féminin bien avant que ce sujet ne devienne polémique. De même, lors de l’expansion missionnaire historique du XIXe siècle, les deux tiers des missionnaires étaient des femmes. Le mouvement des femmes qui luttèrent pour le droit de vote prit naissance dans le mouvement de Réveil conduit par Charles Finney et d’autres qui furent aussi des avocats de l’abolition de l’esclavage. Par contre, ceux qui confondaient la culture biblique et son message étaient voués à accepter l’esclavage et rejeter le ministère féminin. Mais pour des croyants qui sont attachés à la Bible, de simples précédents historiques ne suffisent pas pour régler une telle question ; la réponse doit être fondée sur les Écritures.

Le débat actuel tournant essentiellement autour des enseignements de Paul, nous examinerons ses écrits après avoir brièvement résumé les autres enseignements bibliques à ce sujet.

LE MINISTÈRE DE LA FEMME DANS LE RESTE DE LA BIBLE

Puisque Paul reconnaissait l’autorité de la Bible dont disposaient alors les Juifs et des enseignements de Jésus comme étant la Parole de Dieu, il est bon de jeter un coup d’œil au ministère de la femme tel que perçu dans ses sources.

Le Proche Orient ancien, dont Israël faisait partie, était clairement un monde d’hommes. Le simple fait que Dieu ait parlé à Israël dans le cadre d’une culture donnée ne signifie pas que celle-ci était forcément sainte. Cette culture incluait la polygamie, le divorce, l’esclavage, et une variété d’autres pratiques que nous reconnaissons comme étant impies.

En dépit de la prééminence des hommes dans l’ancienne société juive, Dieu n’en a pas moins appelé parfois des femmes à des positions de leadership. Quand Josias eut besoin d’entendre la Parole de Dieu, il envoya le sacrificateur Hilqiya et d’autres vers une femme qui était de toute évidence une référence prophétique de son temps, à savoir la prophétesse Houlda

Et le roi donna cet ordre au sacrificateur Hilkija, à Achikam, fils de Schaphan, à Acbor, fils de Michée, à Schaphan, le secrétaire, et à Asaja, serviteur du roi : Allez, consultez l’Éternel pour moi, pour le peuple, Et pour tout Juda, au sujet des paroles de ce livre qu’on a trouvé ; car grande est la colère de l’Éternel, qui s’est enflammée contre nous, parce que nos pères n’ont point obéi aux paroles de ce livre et n’ont point mis en pratique tout ce qui nous y est prescrit. Le sacrificateur Hilkija, Achikam, Acbor, Schaphan et Asaja, allèrent auprès de la prophétesse Hulda, femme de Schallum, fils de Thikva, fils de Harhas, gardien des vêtements. Elle habitait à Jérusalem, dans l’autre quartier de la ville. Après qu’ils lui eurent parlé, elle leur dit : Ainsi parle l’Éternel, le Dieu d’Israël : Dites à l’homme qui vous a envoyés vers moi : Ainsi parle l’Éternel : Voici, je vais faire venir des malheurs sur ce lieu et sur ses habitants, selon toutes les paroles du livre qu’a lu le roi de Juda. Parce qu’ils m’ont abandonné et qu’ils ont offert des parfums à d’autres dieux, afin de m’irriter par tous les ouvrages de leurs mains, ma colère s’est enflammée contre ce lieu, et elle ne s’éteindra point. Mais vous direz au roi de Juda, qui vous a envoyés Pour consulter l’Éternel : Ainsi parle l’Éternel, le Dieu d’Israël, au sujet des paroles que tu as entendues : Parce que ton coeur a été touché, parce que tu t’es humilié devant l’Éternel en entendant ce que j’ai prononcé contre ce lieu et contre ses habitants, qui seront un objet d’épouvante et de malédiction, et parce que tu as déchiré tes vêtements et que tu as pleuré devant moi, moi aussi, j’ai entendu, dit l’Éternel.
2 Rois 22:12-19 (Bible, traduction Louis Segond 1910)

Débora, quant à elle, était non seulement prophétesse, mais aussi juge. Elle tenait le plus haut poste d’autorité en Israël de son temps. Elle est aussi un des rares juges dont la Bible ne relate aucun travers (Juges 4 et 5).

S’il est vrai qu’il était rare que les femmes juives du premier siècle étudient sous l’instruction de maîtres de la Loi comme les disciples mâles l’ont fait, Jésus n’en a pas moins permis à des femmes de faire partie de ses proches, ce que la culture de l’époque aurait pu considérer comme scandaleux.

Dans ce temps-là, Débora, prophétesse, femme de Lappidoth, était juge en Israël.
Juges 4:4

Il y avait aussi des femmes qui regardaient de loin. Parmi elles étaient Marie de Magdala, Marie, mère de Jacques le mineur et de Joses, et Salomé, qui le suivaient et le servaient lorsqu’il était en Galilée, et plusieurs autres qui étaient montées avec lui à Jérusalem.
Marc 15:40-41

Ensuite, Jésus allait de ville en ville et de village en village, prêchant et annonçant la bonne nouvelle du royaume de Dieu. Les douze étaient avec lui et quelques femmes qui avaient été guéries d’esprits malins et de maladies : Marie, dite de Magdala, de laquelle étaient sortis sept démons, Jeanne, femme de Chuza, intendant d’Hérode, Susanne, et plusieurs autres, qui l’assistaient de leurs biens.
Luc 8:1-3

Comme si cela ne suffisait pas, il a permis à une femme qui voulait entendre son enseignement de s’asseoir à ses pieds (Luc 10:39), position habituellement réservée aux disciples mâles.

Les enseignants juifs n’acceptaient pas les femmes, d’autant plus qu’un disciple était considéré comme un enseignant en formation. Envoyer des femmes en mission de prédication (cf. Marc 6:7-13) aurait sans doute été trop scandaleux pour être réalisable; mais les évangiles rapportent unanimement que Dieu a choisi des femmes pour qu’elles soient les premiers témoins de sa résurrection, même si les hommes de l’époque refusaient de prendre en compte le témoignage de femmes.

Joël a explicitement mis l’accent sur le fait que lorsque Dieu répandrait son Esprit, des femmes comme des hommes prophétiseraient (Joël 2:28-29). La Pentecôte signifiait que tout le peuple de Dieu était qualifié pour recevoir les dons de son Esprit (Actes 2:17-18), tout comme le salut signifiait que l’homme et la femme auraient la même relation avec Dieu (Galates 3:28). Les effusions suivantes de l’Esprit ont souvent eu les mêmes effets.

PASSAGES OÙ PAUL SOUTIENT LE MINISTÈRE DES FEMMES

Paul a souvent soutenu le ministère des femmes malgré le préjudice que cela pouvait causer dans sa culture. À quelques exceptions près (certaines femmes philosophes), l’éducation poussée était l’apanage des hommes. La plupart des gens dans les pays méditerranéens de cette époque étant illettrés, ceux qui pouvaient lire et parler devenaient souvent des enseignants, essentiellement des hommes. Dans les premiers siècles de notre ère, la plupart des hommes juifs, tels Philo, Josèphe et de nombreux rabbins venus plus tard, reflétèrent le préjudice causé par la culture gréco-romaine, beaucoup plus large.

Le rôle des femmes variait d’une région à l’autre, mais les écrits de Paul le situent clairement parmi les progressistes de son temps en la matière.

Nombre des collaborateurs de Paul dans le Nouveau Testament étaient des… collaboratrices
Paul souligna le ministère d’une femme qui amena sa lettre aux chrétiens de Rome (Romains 16:1-2). Phoebé était une servante de l’église de Cenchrées. Le terme de « servante » est d’ailleurs souvent traduit par diaconesse, terme qui peut correspondre à une responsabilité administrative dans l’Église Primitive.

Dans les épîtres, Paul emploie cependant souvent ce terme pour parler de tout serviteur de la Parole de Dieu, y compris lui-même (1 Corinthiens 3:5 ; 2 Corinthiens 3:6 ; 2 Corinthiens 6:4 ; Éphésiens 3:7 ; Éphésiens 6:21). Il dit aussi de Phoebé :

Elle est venue en aide à beaucoup.
Romains 16:1-2

Ce terme la désigne comme celle qui supervisait vraisemblablement l’église qui se réunissait peut-être dans sa maison. Cela lui conférait une position d’honneur dans l’église. Phoebé n’était certes pas la seule femme influente dans l’Église.

Si Paul salue deux fois plus d’hommes que de femmes dans Romains 16, il y souligne le ministère de deux fois plus de femmes que d’hommes dans cette même liste. Bien sûr, certains utilisent l’argument qu’il y a bien plus d’hommes appelés à diriger dans la Bible que de femmes, mais, dans ce passage, la tendance est inversée.

Ces encouragements peuvent indiquer que Paul était sensible à l’opposition que les femmes ont certainement rencontrée dans leur ministère; ses propos sont remarquables, compte tenu des préjugés à l’encontre du ministère des femmes qui existaient dans la culture de Paul.

Si Paul a suivi la coutume de son temps quand il loua Prisca ou Priscille, il a dû mentionner son nom avant celui de son mari Aquilas à cause de son statut social supérieur (Romains 16:3-4). Nous apprenons ailleurs qu’elle et son mari enseignaient les écritures à un autre serviteur, Apollos (Actes 18:26).

Paul mentionne aussi deux de ses co-apôtres, Andronicus et Junias (Romains 16:7). Junias est clairement un prénom féminin, mais certains écrivains le nient en excluant l’idée que Paul ait pu faire référence à une femme apôtre ; Junias serait donc en fait une contraction du masculin Junianus. Cependant, cette contraction n’existe pas et a même été récemment écartée comme une impossibilité grammaticale en latin. Cette suggestion ne repose pas sur le texte lui-même, mais entièrement sur le présupposé selon lequel une femme ne saurait être apôtre.

Ailleurs, Paul fait référence au ministère de deux femmes à Philippes, qui ont pris part, comme tant d’hommes, à son travail pour l’Évangile dans cette ville (Philippiens 4:2-3).

Les femmes accédaient à des rôles religieux plus élevés en Macédoine que dans la plupart du reste du monde romain (11); cela a pu contribuer à ce que des femmes, collègues de Paul, aient pu être plus rapidement reconnues à des postes de responsabilité dans l’Église que dans les autres provinces (cf. Actes 16:14-15).

Si Paul place les prophètes directement après les apôtres (1 Corinthiens 12:28), il reconnaît aussi le ministère de prophétesse (1 Corinthiens 11:5), conformément à la Bible hébraïque (Exode 15:20 ; Juges 4:4 ; 2 Rois 22:13-14) et à la pratique chrétienne des premiers temps (Actes 2:17-18; Actes 21:9).

Ceux qui se servent du fait que Paul ne parle pas explicitement de femmes pasteurs passent à côté des faits. Paul ne mentionne pas beaucoup plus d’hommes pasteurs. Il parle plus souvent de ses compagnons de voyage dans le ministère, qui étaient naturellement des hommes. « Serviteurs » et « co-ouvriers » sont les titres que Paul emploie le plus couramment pour parler de ses collaborateurs, titres qui s’appliquent tous les deux également à des femmes (Romains 16:1, 3).

Compte tenu de la culture à laquelle Paul s’adresse, il était naturel qu’il y ait moins de femmes qui exercent des fonctions de ministère, celles-ci étant moins autonomes sur le plan social. Lorsqu’il est question de celles qui ont eu de telles responsabilités, Paul les encourage, y compris celles qui étaient apôtres et prophètes, responsabilités parmi les plus élevées dans l’Église.

Si de tels textes établissent le fait que Paul faisait partie des écrivains les plus progressistes de son temps, la controverse qui fait rage actuellement est centrée sur d’autres passages dans lesquels Paul semble s’opposer au ministère de la femme. Avant de les étudier, examinons un passage où Paul s’adresse clairement à une question culturelle typiquement locale.

PAUL ET LE VOILE DE LA FEMME

Si Paul se fait souvent l’avocat de la réciprocité des rôles des hommes et des femmes, il fonctionnait aussi dans les limites de sa culture lorsque cela était nécessaire pour l’Évangile.
Nous commençons donc par son enseignement sur le port du voile car, s’il n’est pas en rapport direct avec la question du ministère de la femme, ce point nous aidera à comprendre les passages qui en parlent.

La plupart des chrétiens d’aujourd’hui sont d’accord pour dire que les femmes n’ont pas besoin de se couvrir la tête de nos jours dans l’église, mais beaucoup ne reconnaissent pas le fait que Paul avait le même type d’approche pour le port du voile pour la femme que pour le refus de les voir prendre la parole dans l’assemblée. Dans les deux cas, Paul a eu recours à certains principes généraux pour les appliquer à une situation culturelle spécifique.

Quand Paul exhorte les femmes dans l’église de Corinthe à se couvrir la tête (c’est d’ailleurs le seul texte biblique qui en parle) il a respecté une coutume très répandue dans bien des cultures orientales de l’époque.
Si les hommes et les femmes doivent tous se couvrir la tête pour des raisons différentes, les femmes mariées se devaient de voiler leur chevelure afin que d’autres hommes que leur mari ne les convoitent pas. Une femme mariée qui sortait sans se couvrir la tête était considérée comme débauchée, ce qui pouvait amener au divorce comme pour une femme adultère.

À cause de ce que le voile symbolisait dans cette culture, Paul demandait aux femmes qui se sentaient plus libres de se couvrir quand même la tête afin de ne pas scandaliser les autres. Parmi ses arguments figure le fait que Dieu créa d’abord Adam; dans la culture particulière à laquelle il s’adresse, cet argument semble rempli de bon sens pour justifier le fait que la femme porte le voile.

LES PASSAGES OÙ PAUL SEMBLERAIT AVOIR RESTREINT LE MINISTÈRE DE LA FEMME

Parce que Paul, dans certains cas, a encouragé le ministère de la femme, nous ne pouvons déduire de ses quelques restrictions à ce sujet qu’elles aient une portée universelle.

Comme dans le cas du port du voile à Corinthe, Paul traitait surtout de situations en rapport avec le contexte culturel local. Cela ne signifie en rien que Paul ait écrit certaines choses pour un temps seulement. Mais cela veut dire que tout ce qu’il a écrit ne s’applique pas de la même façon à toutes les circonstances, et que nous devons prendre ces dernières en compte si nous voulons comprendre comment appliquer ces principes dans divers contextes.

En pratique, personne n’applique aujourd’hui tous les textes à toutes les circonstances, même s’ils disent à qui veut les entendre que ces textes s’appliquent toujours dans tous les cas.

Par exemple, la plupart d’entre nous n’a pas fait une offrande spéciale dimanche dernier pour l’église de Jérusalem (1 Corinthiens 16:1-3). Si nos églises ne soutiennent pas les veuves, nous pouvons en déduire que la plupart des veuves d’aujourd’hui n’ont pas « lavé les pieds des saints» (1 Timothée 5:10). De même, peu de lecteurs plaideraient pour que nous allions tous à Troas pour récupérer le manteau de Paul ; nous reconnaissons le fait que Paul adressa ces mots spécifiquement à Timothée (2 Timothée 4:13).

QUE LES FEMMES GARDENT LE SILENCE !

Deux passages des écrits de Paul semblent au premier abord contredire ses propos les plus progressistes. Gardez à l’esprit que ce sont là les seuls deux passages de la Bible que l’on pourrait être tenté d’utiliser pour contredire le fait que Paul soutenait le ministère féminin.

D’abord, Paul instruit les femmes à garder le silence et à garder leurs questions sur le service pour leur mari à la maison (1 Corinthiens 14:34-36). Paul ne pouvait certainement pas parler d’un silence absolu quelles que soient les circonstances, puisqu’un peu plus tôt dans la même lettre, il reconnaissait que les femmes pouvaient prier ou prophétiser dans l’Église (1 Corinthiens 11:5) ; et la prophétie était mise à un rang supérieur à l’enseignement (1 Corinthiens 12:28).
Le fait de connaître la culture grecque ancienne nous aide à mieux comprendre ce passage. Les explications que les érudits ont pu donner sur ce texte ne s’avèrent pas toutes probantes. Certains s’aventurent à dire que ce serait un scribe qui aurait, plus tard, accidentellement inclus ces lignes dans les écrits de Paul, mais cette interprétation semble bien légère.

D’autres disent que Paul aurait cité ici une position propre à Corinthe (1 Corinthiens 14:34-35), qu’il réfuta ensuite (1 Corinthiens 14:36) ; mais le verset 36 ne ressemble pas à une réfutation.

D’autres pensent que les églises séparaient les hommes et les femmes comme dans les synagogues, si bien que les conversations féminines causaient du trouble. Ce point de vue a deux faiblesses :
– D’abord, la séparation entre les hommes et les femmes dans les synagogues pourraient bien dater de plusieurs siècles après Paul ;
– Ensuite, les chrétiens de Corinthe se rassemblaient dans des maisons, dont l’architecture même aurait rendu une telle ségrégation impossible.

D’autres encore suggèrent que Paul s’adressait en fait à des femmes qui abusaient des dons de l’Esprit ou qui avaient un problème dans l’évaluation de la prophétie.

Si le contexte aborde ces questions, les écrivains anciens faisaient souvent des digressions, et le thème de l’ordre dans l’Église suffit à unir le contexte.

Une autre explication semble plus plausible. Paul affirma ailleurs le rôle des femmes dans la prière et la prophétie (11 : 5) ; il est donc impossible qu’il interdise la prise de parole des femmes sous quelque forme que ce soit. En fait, les églises qui permettent aux femmes de chanter n’appliquent pas non plus ce verset à la lettre.

Paul parlant ici d’une seule sorte d’intervention des femmes, nous devons relever que le seul type d’intervention qu’il mentionne dans 14 : 34-36 est le fait que les épouses puissent poser des questions.

Dans le contexte juif et grec ancien, les étudiants avancés ou les gens instruits interrompaient fréquemment les orateurs publics avec des questions raisonnables. Mais la culture avait privé les femmes d’instruction. Les femmes juives écoutaient dans les synagogues, mais, contrairement aux garçons, on ne leur avait pas appris à lire la Loi en grandissant. La culture ancienne considérait de même comme mal venu de ralentir un orateur par des questions qui trahissaient leur manque de connaissance.

Paul apporte donc une solution à un problème plus large: les maris devraient se préoccuper de permettre à leurs épouses d’avoir accès à la connaissance en les y aidant en privé.

La plupart des maris de l’époque doutaient du potentiel intellectuel de la femme, mais Paul figurait parmi les plus progressistes de son temps. Loin de réprimer les femmes, selon les normes de l’époque, Paul les libérait plutôt.

Ce texte ne saurait être utilisé pour empêcher les femmes d’annoncer la parole du Seigneur (1 Corinthiens 11 : 4-5), et rien dans le contexte ne suggère que Paul interdit spécifiquement aux femmes d’enseigner la Bible. Le seul passage de toute la Bible qui pourrait être cité pour s’opposer au fait que des femmes enseignent la Bible serait 1 Timothée 2 : 11-15.

DANS LE CALME ET LA SOUMISSION

Dans 1 Timothée 2:11-15, Paul interdit aux femmes d’enseigner ou d’exercer l’autorité sur l’homme. La plupart des partisans du ministère de la femme pensent que cette expression signifie en fait « usurper l’autorité » (1 Timothée 2:23), chose que Paul ne voudrait pas que fassent les hommes plus que les femmes.

Dans tous les cas, Paul interdit aussi aux femmes dans ce passage « d’enseigner », ce qu’il semble avoir autorisé ailleurs (Romains 16 ; Philippiens 4:2-3). Il semble donc qu’il ait voulu traiter de la situation spécifique de cette assemblée.

Paul et ses lecteurs connaissaient leur contexte et pouvaient donc le prendre pour acquis; la situation qui a provoqué la réponse de Paul appelait donc clairement celle-ci de par sa nature.
Ce n’est probablement pas une coïncidence si le seul passage de la Bible qui interdit aux femmes d’enseigner se trouve être dans la même épître où nous savons explicitement que de faux docteurs visaient à semer le trouble en se servant des femmes.

Les lettres de Paul à Timothée à Éphèse nous donnent un aperçu de la situation : de faux docteurs (1 Timothée 1:6-7 ; 1 Timothée 1:19-20 ; 1 Timothée 6:3-5 ; 2 Timothée 2:17) entraînaient les femmes dans l’égarement (2 Timothée 3:6-7). Ces femmes étaient probablement, et en particulier, certaines veuves qui possédaient des maisons que ces faux docteurs pouvaient utiliser pour y tenir leurs réunions (cf : 1 Timothée 5:13. Un des termes grecs employés ici parle de propager des non-sens).

Les femmes étaient les plus vulnérables face aux faux enseignements par le simple fait qu’elles avaient eu très peu d’instruction. Un tel comportement ne pouvait qu’entacher le témoignage de l’Église dans une société hostile qui était déjà convaincue que les chrétiens pervertissaient le rôle traditionnel des femmes et des esclaves.

Paul offre donc une solution à court terme : « N’enseignez pas » (compte tenu des circonstances) et une autre à plus long terme : « Qu’elles apprennent » (1 Timothée 2:11). Nous lisons aujourd’hui : « Que la femme s’instruise en silence », et nous pensons que l’accent est mis sur le « silence ». Le fait que ces femmes devaient s’instruire « dans un esprit de paix et de parfaite soumission » nous parle du témoignage qu’elles devaient rendre dans la société selon ce qui était couramment attendu des femmes.

La culture de l’époque voulait que tout étudiant débutant, contrairement à ceux plus avancés, s’instruise en silence ; voilà pourquoi les femmes n’étaient pas censées poser de questions (voir note plus haut). Le même mot « silence » qui est employé ici s’applique à tous les chrétiens dans le contexte (1 Timothée 2:2).

Paul parle spécifiquement de cette question concernant les femmes pour la même raison pour laquelle il exhorte les hommes à ne pas se disputer (1 Timothée 2:8) : ils étaient tous impliqués dans les groupes qui constituaient l’église d’Éphèse.

Là encore, il semble que le plan de Paul à long terme est de libérer, et non de subordonner le ministère de la femme.

La question n’est pas une affaire de genre mais de connaissance de la Parole de Dieu. Ce qui pousse bien des érudits à douter de cette interprétation par ailleurs fort logique, c’est l’argument suivant de Paul où il fonde son appel sur le rôle rempli par Adam et Ève (1 Timothée 2:13-14).

L’argument de Paul, tiré de l’ordre de la création, est le même qu’il a utilisé plus haut pour démontrer que les femmes devraient porter un voile (1 Corinthiens 11:7-9). Autrement dit, Paul citait parfois les écritures pour répondre à certaines circonstances dans un contexte donné qu’il n’aurait pas appliqué dans tous les cas. Si Paul avance souvent des arguments universels à partir de l’Ancien Testament, il élabore parfois des arguments logiques à partir d’une analogie.

Son argument concernant la séduction d’Ève entre encore plus dans cette catégorie. Si la chute d’Ève empêche que toutes les femmes enseignent, cela signifierait que Paul affirme que, semblables à Ève, les femmes sont toutes plus facilement séduites que les hommes. Il est clair que, dans ce cas, il ne faudrait pas permettre aux femmes d’enseigner d’autres femmes, de peur qu’elles ne soient encore plus séduites.

Mais si la séduction ne s’applique pas à toutes les femmes, son interdiction non plus. Paul a probablement utilisé Ève pour illustrer la situation des femmes non instruites auxquelles il s’adresse à Éphèse ; mais dans un autre texte, il parla d’Ève pour nous mettre tous en garde contre la séduction, et pas seulement les femmes (2 Corinthiens 11:3).

Parce que nous ne croyons pas que Paul se soit contredit, son approbation du ministère féminin ailleurs dans la Parole de Dieu confirme que 1 Timothée 2 : 9-15 ne saurait interdire le ministère de la femme de manière générale. Il traita du sujet dans un contexte bien particulier.

Certains ont protesté en disant que les femmes ne devraient pas exercer d’autorité sur les hommes parce que les hommes sont appelés à être « la tête ». En dehors des nombreux débats sur le sens exact du terme grec « tête » (qui est par exemple parfois traduit par « source» plutôt que « autorité sur »), Paul parlait du mari comme chef, ou tête et non de l’homme en tant que mâle qui serait la tête de la femme.

De plus, nous, pentecôtistes et charismatiques, affirmons que l’autorité du serviteur de Dieu est inhérente à son appel et au ministère de la Parole, et non à l’individu en tant que tel. Nous croyons donc que le ministère peut être exercé autant par l’homme que par la femme, comme pour l’apôtre Paul.

CONCLUSION

Il nous faut aujourd’hui reconnaître ceux que Dieu appelle, qu’ils soient hommes ou femmes, et les encourager en tant qu’ouvriers potentiels, en vue de servir la moisson qui est abondante.

Texte écrit par Craig S. Keener publié dans la revue « Ressources Spirituelles » N°10 Automne 2004 (Life édition) Craig S. Keener est professeur de Nouveau Testament à Eastern Seminary, Wynnewood, Pennsylvanie. Il a écrit une dizaine de livres, notamment sur la conception qu’a Paul de l’épouse et de la femme, ainsi que plusieurs commentaires bibliques.